une histoire d\'amour

CHAPITRE 2

Le destin

C'est toujours  par hasard 

   qu'on accomplit  son destin.  

 Marcel Achard

Pendant ces vingt années, bien des fois sur l’écran de l’ordinateur les pages blanches de l’annuaire m’ont affiché : « inconnu… pas de réponse à la demande… ».  Car parfois je te cherchais. J’aurais tellement voulu trouver une trace de toi. Ton nom quelque part. Savoir où tu vivais, avec qui. Mais je restais sur ma faim. J’aurais pu, c’est vrai, téléphoner à tes parents, à un de tes frères. Je n’ai jamais osé. Je me disais que leur accueil serait bien glacial après tout ce que tu avais enduré à cause de moi.

Et parfois, on ne sait pas pourquoi, quand on s’y attend le moins, le temps s’arrête.

Pourquoi cet après-midi là ai-je eu l’idée saugrenue d’abandonner l’annuaire et de tout simplement taper ton nom sur un moteur de recherche.  Nul ne sait. Le fait est, que l’adresse d’un site s’est affichée, une adresse mail… et mon cœur à cet instant précis, a fait un bond dans ma poitrine.

Je t’avais retrouvé.

T’envoyer un message après tout ce temps ?

Comment allais-tu réagir ? y répondrais-tu ? Que faire ? Je ne pouvais pas ne pas t’écrire. C’était plus fort que moi. D’abord, il fallait trouver un pseudonyme. Lequel ? Ta messagerie de travail, il fallait que j’attire ton attention. Alors j’ai choisi Diva, le nom de mon parfum. Tu m’avais écrit un poème sur ce parfum que tu adorais. Tu ne pouvais pas avoir oublié.  

Mardi 3 avril – Diva : Message perso -« Bonjour !  en surfant sur le net... un site inconnu... un coup d'oeil à la va vite... et tout à coup mon coeur qui s'arrête... un nom... une photo... je ne sais plus où j'en suis... des milliers de souvenirs enfouis qui resurgissent quand on ne s'y attend pas... comment vas-tu ? qu'est-ce que tu deviens ? Je me suis mille fois posé cette question... 20 ans déjà... que nos chemins se sont séparés ...  Que l'espoir d'un lendemain peu à peu s'est effrité, que nos vies se sont construites... avec des joies et des peines... chacun de son côté.  Le temps passe... le temps fait son oeuvre...mais je n'ai jamais oublié... une petite flamme brûle dans un coin de mon cœur pour l'éternité j'aimerais beaucoup avoir de tes nouvelles...  Nathalie».

Les minutes, les heures ont passé sans réponse. Le temps semble long. On vérifie mille et une fois la messagerie qui reste désespérément vide. Une semaine s’est écoulée. Je me suis dis alors que tu avais très certainement ta vie, ta famille, que tu avais peut-être peur que je vienne bousculer ce que tu avais construit. J’ai pourtant décidé d’envoyer un deuxième message, une deuxième bouteille à lamer.

Mardi 10 avril–  « Bonjour Sébastien, Je suis déçue de ne pas avoir reçu de réponse à mon précédent message. Je voudrais juste quelques nouvelles de toi rien de plus. Moi-même, j'ai construit ma vie. Je suis mariée, j'ai deux enfants mais c'est vrai que même si le temps passe les souvenirs restent. J'espère à bientôt de te lire. Amicalement, Nathalie ».

Et là… une réponse s’affiche quand on n’y croit plus.

«Dis moi que je ne rêve pas est ce vraiment toi ? je n’ai pas reçu de message précédent. J'attends »

Incroyable, je t’avais retrouvé .

« Je t'ai envoyé un message lundi dernier. Si tu n'as connu qu'une seule Nathalie c'est bien moi ! Que deviens-tu ? »

«Je n'en ai connu qu'une et elle me manque depuis  19  ans ça ne peux être que toi.  Seb ».

La vie est bizarre tout de même. Des années sans trace de toi et là, en quelques minutes le passé resurgissait et les souvenirs coulaient à flots. Je me trouvais dans un mélange d’ excitation, de joie et de tristesse, de crainte… tout se bousculait… difficile de retrouver ses esprits.

« Nathalie, est-ce qu'on pourrait s'appeler ? ça nous ferait du bien de parler  mais surtout sans faire de mal à autrui »

 « Tu n'as pas d'autre adresse e-mail ? une perso ? Je te contacte dès que possible. Gros bisous en attendant. »

« Pour le moment je n'ai que celle-là, je suis également marié mais   sans enfant - as tu un n° de portable ?»

« Non pas de portable, écris plus longuement quand tu pourras. Tu trouveras bien un moment... Je voulais simplement que tu saches que je n'ai jamais oublié... que je vis avec les souvenirs... je préfère penser aux bons plutôt qu'aux mauvais... Je pensais que tu me détestais... Voilà... »

« Tu as gardé  le même parfum... Diva ? »

« Oui... je porte toujours Diva... »

Comment je suis rentrée à la maison ce soir là, je l’ignore. J’étais sur un nuage. Où cela allait-il me mener ? Je n’en savais rien. Il fallait être prudent. Toi et moi étions mariés. Il ne fallait surtout pas chambouler nos deux vies. Tes quelques phrases résonnaient encore et encore dans ma tête «je n’ai connu qu’une Nathalie et elle me manque depuis dix neuf ans». Et moi qui croyais que tu me détestais. Toutes ces années à me demander si je ne m’étais pas fait unfilm, si tu m’avais vraiment aimée aussi fort que je t’avais aimé, si tu pensais encore à moi… et là…