une histoire d\'amour

une histoire d\'amour

samedi 21 mai

 

 

 

 

L'opération de maman s'est bien passée. Je l'ai retrouvée défigurée mais "bien". Il faut une semaine pour que le visage reprenne une apparence normale, pour que les bleus s'atténuent et virent au jaune, pour que ça désenfle. C'est vraiment impressionnant.

Je passe "un peu" de temps avec maman c'est à dire 2 à 3 heures par jour. Pour elle ce doit être peu. Et j'ai honte de dire que pour moi c'est beaucoup. Rester là, assise près d'elle à la table de cuisine. Ecouter, raisonner... n'arriver à rien... toujours cette tristesse, cette négativité, ce désespoir, ces idées noires où l'avenir n'a plus sa place. Avec la mort de papa, la vie de ma mère s'est arrêtée. Ses pensées ne sont plus que chagrin, regrets, remorts... c'est tellement étouffant...

J'aime maman. Elle est ma seule famille. Je tourne et retourne la situation dans ma tête depuis deux ans que papa nous a quittées. J'en arrive à lui dire à présent "mais bon sang arrête de vivre avec les morts, tu as tes petits enfants, ta fille, ta mère encore. Vis avec ceux qui sont là, vis avec les vivants ! ceux qui t'aiment, qui ont besoin de toi, qui veulent te voir heureuse !"

J'étouffe je l'avoue. C'est comme si je ne trouvais plus d'air pour respirer tellement cette atmosphère m'oppresse. Je n'ai que 44 ans. Ca fait deux ans que je vis journellement cette tristesse. Je n'en peux plus. Tout ce que je peux dire n'y change rien. Toute la gentillesse, toute la brusquerie, tout ce que j'ai essayé pour sortir ma mère de cette torpeur, de cette bulle dans laquelle elle s'est enfermée et dans laquelle j'en viens à penser qu'elle se complait... rien ne change...

Se lever, tourner en rond dans sa maison, fuir les gens, méditer sur son malheur... en résumé c'est la vie de maman. Refuser les invitations à droite à gauche même les plus simples comme celles "viens faire un tour en ville avec moi", "viens marcher"... Se plaindre de l'indifférence des gens, mais faire le vide autour de soi de par son attitude... Que faire mon Dieu ? que faire ? rechercher la compagnie de gens dans le malheur qui tiennent les mêmes propos qu'elle et qui ne font qu'accentuer le mal être dont elle souffre... Comment nous sortir de ces sables mouvants ? comment provoquer chez elle un électro choc ?

 

Du soutien ? je n'en ai de personne. Les amis, plutôt les "gens" car les amis se font plus que rares quand on est dans le malheur. Les "gens" me disent "vis ta vie, laisse là, elle va s'y faire ! tu as ton mari, tes enfants, elle n'a pas le droit de te faire subir tout ça !" Mais les "gens" ne sont pas à ma place. Comment pourrais je vivre ma vie indifférente au chagrin de ma mère ? comment ? je n'y arrive pas.

J'ai rencontré une psy un petit moment. Elle m'a dit que je devais "grandir" que j'étais encore dans le raisonnement du petit enfant qui veut "faire plaisir" à sa maman... Ah bon ! c'est peut être vrai... je ne peux pas être heureuse quand je vois ma mère changer, dépérir, se murer dans toute cette noirceur...

A tous ces gens qui "eux" savent, sauraient, assumeraient différemment je dis...  que c'est facile de parler, de dire "je ferais" quand ce ne sont que des mots et qu'on ne vit pas la situation. Il faut "vivre" une situation pour comprendre... si demain je me retrouvais seule... comment je réagirais ? si tous mes amis me tournaient le dos ? si le silence seul répondait à mes besoins de dialogue ? si plus aucune épaule n'était là pour me consoler quand ça ne va pas ?

Bref ! je me mets à la place de ma mère. Mais je me dis aussi qu'après une période de deuil, un jour où l'autre, il faut ranger son chagrin dans un tiroir. Il est là,  toujours présent, mais un peu à l'écart. Il faut prendre le taureau par les cornes comme on dit et décider d'avancer, continuer... se trouver de nouvelles motivations, de nouveaux buts... s'intéresser et prendre du temps pour ce qui nous toujours passionné et se lancer de nouveaux défits... mais pour cela, il faut de la volonté, de la force... il faut aller de l'avant... et  pour en revenir à maman... cette force elle doit la trouver en elle, elle doit faire ce "travail" elle-même... si elle ne décide pas "elle" de s'en sortir... je ne pourrai hélas pas le faire à sa place...

Dieu comme tout cela est lourd... trop lourd...

 

propos pris sur le web

 

Des parents se débrouillent - inconsciemment s'entend - pour s'accrocher à leurs enfants, telle une pierre à un nageur, pour que ces derniers ne puissent pas, libres de toutes entraves, aller là où leur désir pourrait les mener. Ils usent, pour organiser ces "chaînes", d'une arme terrible et qui fait mouche à tout coup : la culpabilité.

 


Comment, en effet, ne pas se sentir en faute face à des gens qui se présentent comme n'ayant plus droit à tout ce dont soi-même on jouit : un corps en bonne forme, des moyens suffisants pour vivre, une vie familiale, affective et sexuelle ?


Comment ne pas penser que l'on serait coupable de ne pas partager ces bienfaits avec ses vieux parents ?

 

Cette vérité banale est difficile à entendre pour des enfants pris, pieds et poings liés, dans le piège de l'amour, de la culpabilitéet d'une règle du jeu faussée depuis l'enfance.


Si bien que beaucoup cèdent à ce chantage affectif, sacrifient leur vie, sans aucun bénéfice pour personne... car leurs parents ne sont pas plus heureux après avoir reçu ce cadeau exorbitant.

Il est très difficile de dire si prendre ses parents chez soi est, ou non, une bonne solution ; il n'y a en la matière que des cas particuliers.


Une femme célibataire trouvera un réconfort affectif dans la présence de sa vieille maman, alors qu'un couple encore actif peut mal supporter une cohabitation entre générations

Certains parents en viennent à peser sur la vie de leurs enfants alors qu'ils auraient pu faire autrement parce qu'ils n'ont pas su - ou pas voulu - organiser leur vieillesse, ni sur le plan matériel, ni sur le plan affectif.


Ils se retrouvent seuls, démunis, sans amis, parce qu'ils n'ont jamais admis, au fond d'eux-mêmes, que leurs enfants doivent les quitter un jour pour aller vivre leur vie et ne supportent pas plus aujourd'hui qu'ils soient dans la fleur de l'âge au moment où eux-mêmes sont sur le déclin

 

L'assistance à des parents âgés est un devoir auquel on ne peut se soustraire sans sombrer dans l'inhumanité, le faire au prix de sa propre vie relève - n'en déplaise aux bonnes âmes - ni plus ni moins, de la névrose.

 

« On ne reconnait pas les instants marquants de nos vies au moment où on est en train de les vivre. On s'habitue à tout, les choses, les idées, les gens, mais on ne se rend pas compte de notre chance parfois. C'est seulement lorqu'on risque de perdre quelque chose qu'on se rend compte à quel point on y tient, à quel point on en a besoin, à quel point on l'aime. » ?

 


 




19/05/2011
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